Sommaire

Repères biographiques
Ecrits
Sur la vie et l'oeuvre...
Débats, interviews, etc.
Multimedia
Contact
Mailinglist

Maintenant pour 12 euro !

Double DVD:


Liens
Castellano
Deutsch
English
Nederlands
Fédéralisme et aménagement du territoire
Ernest Mandel - Archives internet
Ernest Mandel Imprimer

La Gauche n°40, 26 octobre 1968

 

L'organisation des transports publics, le logement, les schémas de circulation, la reconstruction des villes et leur adaptation aux besoins nouveaux de la vie des hommes restent soumis dans les pays capitalistes aux intérêts économiques dominants dans la société.

L'urbanisme, l'architecture, l'aménagement du territoire posent des problèmes qui sont moins d'ordre technique que d'ordre politique. La vie quotidienne de millions d'hommes est résolue, dans ces domaines également, en fonction des intérêts immédiats des trusts ou des spéculateurs fonciers. Et les décisions des « pouvoirs publics » (quand ils décident par exemple de supprimer une ligne de chemin de fer, de construire une autoroute, d'aménager à tel endroit un quartier de banques ou un quartier d'habitations, etc.) restent tributaires d'autres pouvoirs que le leur. Là également, l'Etat bourgeois révèle sa vraie nature d'instrument au service des classes dominantes.

Architectes et urbanistes ont également été touchés par ce que l'on a appelé « le mouvement de contestation » et les plus lucides d'entre eux ont choisi de dépasser le cadre de  revendications corporatistes (l'organisation de leurs professions) pour s'attaquer à ce qui détermine en fin de compte les choix qu'ils sont amenés à faire: la nature capitaliste du régime (lire à ce propos « La Gauche » du 17 août où nous rendions compte de la réunion d'Etats généraux de l'Architecture et de l'Urbanisme).

La revue « Synthèse » a consacré son numéro de mai-juin aux problèmes de l'urbanisme. Dans les contributions de J. Remy, J.-P. Blonde, P. Laconte et P. Puttemans en particulier, un militant socialiste peut trouver matière à réflexion.

Des choix politiques

« II faut repolitiser l’urbanisnae » écrit Blondel. Très bien, encore faut-il que le débat politique sur les choix urbanistiques ne soit pas une mêlée confuse dont quelques intérêts financiers sortiraient encore vainqueurs. Pour qu'un tel débat soit sur le terrain d'un combat progressiste, il faut que le citoyen ait des idées générales sur l'évolution de la société non seulement en ce qui concerne les rapports de production et les rapports de force entre classes sociales, mais aussi en ce qui concerne l'agencement dans l'espace des activités des hommes.

J. Remy pose le problème : « Se demander si l'avenir est aux grandes concentrations urbaines ou si, au contraire, on doit retourner vers une plus grande dissémination de la population ». Pour qui veut le fédéralisme dans un pays où deux peuples voient leur activité se concentrer de plus en plus dans une grande ville, la question est d'importance. L'auteur n'y répond pas exactement, il fait plutôt un inventaire des avantages et des inconvénients de la ville par rapport au village, pour l'employeur et pour le travailleur. Dans une grande ville, l'employeur peut choisir une main-d'œuvre mieux adaptée parmi un plus grand nombre de travailleurs. Ceux-ci y trouvent une plus grande liberté individuelle dans le choix non seulement de l'emploi, mais aussi des loisirs et des relations personnelles.

Ceci pour les avantages, mais quelles sont les tendances objectives? Dispersion de l'habitat, à la recherche de la nature et de l'isolement, répond J.-P. Blondel, dispersion facilitée par cette ubiquité d'une partie des loisirs culturels qu'apporte la télévision. C'est une mobilité croissante qui a permis cette dispersion: le tram a permis les banlieues, l'auto conduit à la campagne. Mais l'emploi continue à se concentrer dans le centre des villes du fait de la mécanisation de l'agriculture, de l'automatisation de l'industrie, du « secteur tertiaire », amalgame de fonctions où les communications jouent un rôle important. Les gens qui continuent à habiter dans le centre des villes sont essentiellement les prolétaires les plus pauvres qui ne peuvent pas acheter d'auto et qu'un emploi fragile maintient à proximité des nœuds de transports en commun où ils pourront trouver un nouvel emploi sans déménager. C'est le développement des « colonies » espagnoles et marocaines près des grandes gares à Bruxelles.

La tendance générale est donc: dispersion de l'habitat, concentration de l'emploi, ceci dans les limites permises par les moyens de transport.

Automobile individuelle ou transports publics ?

Le plus souple est l'auto, c'est aussi le plus encombrant: P.Laconte montre qu'un automobiliste occupe en moyenne soixante à cent fois plus de place qu'un usager des transports en commun. La généralisation de l'automobile provoque l'asphyxie du centre de la ville : pertes de temps dans les embouteillages ou à la recherche d'un parking Des travaux coûteux défigurent le centre historique. On sacrifie la ville-pour-vivre à la ville-pour-y-rouler.

Mais les nouvelles voies de circulation sont rapidement saturées aux heures de pointe, dans la mesure même où elles rendent la circulation possible. Car chacun n'a pas encore son auto et le nombre de celles-ci peut encore au moins doubler. Le nombre des voitures particulières en circulation augmente d'autant plus vite que le tram et le bus offrent encore plus d'inconvénients pour l’usager: ils sont ralentis par les autos et, dans un contexte de rentabilité a assurer, la diminution de leur clientèle diminue la fréquence des services et augmente les prix.

Il y a des solutions immédiates: couloirs de circulation réservés aux bus, tram et bus gratuits, parking payant partout où il y a saturation; le contrôle des parcmètres ouvrirait des emplois compensant la suppression des receveurs de tram, le produit des parcmètres couvrirait les frais de transports en commun. Mais ces solutions vont à rencontre d'un individualisme et d'un fétichisme de l'« auto-symbole-de-promotion-sociale » qui s'étayent mutuellement.

Cette asphyxie du centre urbain - qui est aussi celle des citadins par les gaz d'échappement - et l'augmentation du prix des terrains arrivent à contre-balancer les avantages de l'accès à un grand réservoir de main-d'œuvre et de communications faciles a l'origine. L'asphyxie conduit à la désintégration urbaine, c'est-à-dire à « une certaine migration des commerces, des bureaux et même des centres culturels et de délassement vers la périphérie, provoquant dans bien des cas le dépérissement de la cité ». Cette décentralisation de l'emploi n'affecte cependant pas uniformément tous les secteurs d'activité.

Les usines semi-automatisées qui emploient surtout des manœuvres spécialisés, peuvent facilement s'implanter à la campagne et puiser l'essentiel de leur main-d'œuvre dans la population locale; les salaires plus bas compensent, pour le patron, les appointements plus élevés qui ont convaincu quelques cadres et techniciens de quitter la grande ville. Par contre, les usines qui emploient essentiellement des ouvriers professionnels et des techniciens, les bureaux d'étude, les organisations commerciales et les administrations ont besoin de pouvoir choisir leur main-d'œuvre qualifiée dans la grande ville où elle est d'ailleurs moins chère.

Cette restriction est-elle provisoire, et allons-nous vers une dispersion uniforme de l'habitat et de l'emploi? On peut croire que le développement des moyens de communication électroniques va permettre aux gens de travailler ensemble tout en étant très éloignés dans l’espace, donc sans devoir s’entasser dans des bureaux; on retournerait au travail à domicile, et celui-ci pourrait être choisi avec la plus grande liberté. Mais rien ne dit que cette liberté conduira à une dispersion toujours plus grands à l'époque où la distinction entre lieu de travail et lieu de repos s'estompera en même temps que la distinction entre travail et loisir, c'est-à-dire à l'époque du socialisme avancé.

Si aujourd'hui beaucoup s'isolent dans leur maison de banlieue ou de campagne - ou rêvent de pouvoir le faire - c'est pour échapper aux agressions de l'usine et de la rue. Quand celles-ci auront disparu, le besoin de vivre en société peut prendre le dessus.

L'urbanisation de la Wallonie

En fait, il est hasardeux de deviner comment voudront vivre nos descendants libérés de contraintes qui déterminent fortement nos propres jugements; il faut donc rester à l'affût des tendances qui se font jour dans les pays industriels les plus avancés. On y constate que dans certaines régions fortement peuplées, les villes en s'étendant finissent par former une agglomération à plus grande échelle, appelée conurbation ou nébuleuse: la « mégapolis » du nord-est des Etats-Unis qui s'allonge de Washington à Boston ou la Randstad Holland qui englobe Rotterdam, La Haye et Amsterdam.

On constate aussi qu'on y demande de nouveaux moyens de transport en commun et que là où ils existent apparaissent des « super-blocs, véritables villes dans la ville, unités intégrées de commerce, de bureaux et d'appartements où le piéton est roi, mais construites au-dessus des gares de chemins de fer et de métro ». De cette modalité de renouveau du centre urbain, le Centre Rogier offre un premier exemple en Belgique.

La mégapolis du nord-est des Etats-Unis ne souffre pas seulement de la congestion de ses autoroutes, mais aussi de celle des aérodromes. A cette super-ville, il faut un super-métro et qui approche de la vitesse de l'avion. Or, de nouvelles techniques de transport terrestre font l'objet d'études, surtout en France et aux Etats-Unis, où les pouvoirs publics ont déjà accordé d'importants contrats d'étude aux plus grosses sociétés industrielles. Moteur électrique linéaire, coussin d'air, train suspendu, tunnel «vide», une combinaison de plusieurs de ces techniques peut donner dans peu d'années un véhicule terrestre qui circule à une vitesse moyenne de l'ordre de 300 km/h.

Son installation sera plus coûteuse que celle du chemin de fer classique, du fait des techniques mêmes et parce que, pour exploiter ses avantages, il doit pénétrer au centre même des villes existantes. Il ne sera rentable que là où le débit peut devenir très important, c'est-à-dire entre les centres de quelques villes qui ont formé une nébuleuse urbaine.

Inversement, si les pouvoirs publics font le sacrifice de l'implantation d'un tel moyen de transport dans une région où la population est dense mais dispersée, comme le sillon industriel wallon, cette région peut devenir une vraie ville. Mais l'augmentation de la vitesse des transports en commun n'est pas le seul axe des recherches en cours. Le transport individuel peut aussi évoluer. La voiture électrique diminuera bientôt la pollution atmosphérique dans les villes. Un ordinateur pourrait agglomérer les voitures en « trains » et les téléguider sur les autoroutes pour laisser le conducteur reprendre son autonomie sur les petites routes; on évite ainsi le transbordement de l'usager dans des gares-parkings et la distinction entre transport individuel et transport en commun tend à s'estomper.

Il est clair que cet autre axe de développement est lié à la dispersion de l'habitat, qui n'est pas une donnée immuable. P. Laconte écrit dans Synthèses que « le visage futur des villes, lieux d'échanges, sera fonction essentiellement des techniques de transport qui y domineront ». On peut aller plus loin et dire que le projet urbanistique futur associera étroitement l'aménagement de l'espace et le choix des techniques de transport et de communication, donc le choix des voies de développement technologique.

On voit dès à présent qu'il faudra choisir entre une certaine concentration de l'emploi et de l'habitat, associée à un moyen de transport en commun rapide et un habitat dispersé associé à des transports individuels sophistiqués. Des choix comme celui-ci seront l'objet par excellence de la démocratie socialiste.

L'unitarisme et les contradictions qu'il engendre

Une ville, en un sens, n'est qu'un espace où sont concentrés des emplois de transport permettant à n’importe qui d’aller travailler n’importe où. Si on considère que les gens admettent, en moyenne de consacrer une à deux heures par jour au trajet domicile-travail, une ville peut avoir, avec les moyens de transport actuels, un rayon maximum de 300 Km, et les nébuleuses actuelles pourront devenir de vraies villes.

Dans les réalisations en cours, on distingue déjà cette tendance. A côté du métro classique, destiné à décongestionner la circulation en surface dans le centre de la vieille ville, comme on en construit encore à Stochholm, Bruxelles, Rotterdam ou Prague, il y a déjà d’autres réalisations. Celles-ci font toujours appel à la technique classique de la roue porteuse et motrice mais poussée à la limite de ses possibilités et réunissent un chapelet de villes importantes. Le Tokaïdo couvre les 500 Km de Tokyo à Osaka en trois heures avec un dizaine d’arrêts. Le Bay Area Rapid Transit décrit une boucle de 100 Km autour de la Baie de San Francisco.

On peut dire que le véritable métro de Bruxelles n’est pas celui que l’on construit, mais le réseau de la SNCB Gand, Anvers, Mons, Charleroi et Namur sont des villes satellites de Bruxelles avec laquelle elles forment une conurbation de 6 millions d’habitants.

La SNCB en est bien le métro, utilisé par 150.000 provinciaux qui viennent travailler chaque jour au centre de Bruxelles. On peut se féliciter de l’existence de ces villes satellites qui manquent cruellement à d’autres capitales, qui équilibrent l’attraction du centre et lui évitent une congestion insurmontable. Cet équilibre existe avec Anvers et Gand, puisque les investissements industriels en Flandre ont permis une certaine migration de Flamands de Bruxelles vers la Flandre.

Mais on ne peut pas parler d’équilibre entre Bruxelles et le Hainaut dont le déclin économique pousse les habitants à Bruxelles comme immigrants ou navetteurs. Par ce double mouvement, la population de Bruxelles est de plus en plus francophone. Mais elle trouve, sur les lieux de travail, un bilinguisme qui entre de plus en plus dans les faits sous la triple poussée des revendications culturelles flamandes du développement industriel de la Flandre et de la concentration commerciale et administrative dans la capitale.

Pour les trois composants de cette conurbation belge, les contradictions économiques, culturelles et territoriale sont étroitement imbriquées : les Flamands ont vu, dans leur région, l’industrie se développer, mais autour d’un pôle qui exerce une attraction grandissante toute en leur restant étranger, bien qu’établi sur leur territoire. Les Wallons, devant l’hémorragie de l’emploi, ont le choix entre la navette et le déménagement à Bruxelles où le handicap de leur unilinguisme s’ajoute à leur rancœur. Le Bruxellois se décide alors à repasser la frontière linguistique et répand la laideur de la banlieue sur le Brabant wallon, retournant à mi-chemin d’où vient le nouvel immigrant wallon. Avantage du contact des cultures ? Les deux moitiés de l’université de Louvain s’ignorent : à l’Université de Bruxelles, on demande le dédoublement complet ainsi que d’autres institutions.

Le fédéralisme permettrait un autre aménagement du territoire

On peut croire la centralisation irréversible et juger le fédéralisme utopique ou inadéquat. Mais il faut se rappeler que cette concentration urbaine de l’emploi est d’abord un aspect de la concentration capitaliste au profit d'une bourgeoisie qui camoufle son pouvoir derrière ces contradictions culturelles et territoriales.

On peut répondre que la concentration du capital n'est qu'un aspect d'une socialisation croissante du processus de production et qui se poursuivrait après l'élimination du capital.

Mais après cette élimination, dès à présent s'ils le veulent, les travailleurs pourront choisir le cadre de cette socialisation. Et plutôt que de continuer à cohabiter en s'ignorant dans le magma urbain de Bruxelles et ses villes satellites, juger préférable de reconstruire progressivement l'emploi et l'habitat selon les possibilités de la technique la plus récente et d'un terrain relativement vierge en plein cœur de la Flandre et de la Wallonie.

Or, les infrastructures urbaines ont la force de leur durée qu'on ne peut supprimer d'un trait de plume ou d’un vote. Pour renverser la vapeur, la Flandre et la Wallonie ont besoin chacune d'un pôle d'attraction à opposer à Bruxelles. En Flandre, Anvers peut jouer ce rôle. En Wallonie, il y a au moins deux centres secondaires: Liège et Charleroi, quatre avec Namur et

Mons, dont les particularismes sont exacerbés par l’immobilisme devant la décadence.

Pour que ce sillon industriel wallon cesse de devenir la banlieue grise de Bruxelles, il faut, bien sûr, y créer de nouvelles entreprises que le capitalisme refuse, mais il faut aussi en faire une ville, une seule ville. Le nouveau moyen de transport qui va voir le jour en offre la possibilité.

Les vieilles concentrations urbaines et industrielles qui groupent l'essentiel de la population wallonne sont précisément alignées dans ce sillon Sambre et Meuse. Une seule ligne de super-métro suffit donc et est immédiatement « rentable ».

La mise au point et la construction de ce super-métro est d'ailleurs un domaine d'activité tout trouvé pour notre construction électromécanique à la recherche de nouveaux produits. Suivant l'époque où serait prise la décision de le construire, ce super-métro pourrait d'ailleurs appliquer l'état le plus avancé des techniques classiques plutôt que des techniques nouvelles. Cela, c'est l'affaire du technicien.

Celle du citoyen est de savoir que la centralisation - démocratique - de la production et de la gestion autour d'un pôle wallon plutôt que du pôle bruxellois demande un nouveau moyen de transport assez rapide pour faire de la Wallonie une ville unique. C'est peut-être une condition de succès de la voie « Fédéralisme et réformes de structure ».

« II faut rêver » disait déjà Lénine

Sacrifions à l'utopie : dans vingt ans, en 1990, l'Etat fédéré wallon a créé quelques industries modernes à Liège et à Charleroi, une partie importante des ministères est installée à Namur. Le super-métro permet d'aller de Lille à Aix-la-Chapelle en une heure une ligne perpendiculaire met la cité administrative ou l'Université de Namur à dix minutes de l'aéroport, toujours à Zaventem, ou du Centre européen de recherches nucléaires de Focant.

Grâce à cette ligne Nord-Sud, des Bruxellois de plus en plus nombreux viennent travailler à la cité administrative de Namur. Des lignes transversales de métro classique à Liège, Charleroi, La Louvière et Mons rapprochent la population et les entreprises des gares du super-métro. La voiture particulière reste le complément de ce réseau de transports en commun, car la répartition de l'habitat, encore relativement vétusté, a peu évolué; on a donné la priorité  à la reconstruction d'une industrie et aux transports.

On a cependant commencé à construire sur le plateau du Condroz, parallèlement à la vallée de la Meuse, un chapelet de « villages verticaux », distants de 5 km, qui groupent chacun, dans un bâtiment unique, au milieu d'un parc de 500 hectares, le logement de vingt mille habitants, et tous les services qui peuvent être décentralisés à cette échelle. Au sous-sol, la gare du métro classique qui dessert le chapelet met votre appartement à moins d'un quart d'heure de la gare de super-métro la plus proche. Le plan prévoit de commencer en l'an 2000 la construction d'un chapelet analogue entre Namur et Mons.

La Gauche n'est pas une feuille de science-fiction, me direz-vous; il faut abattre le capitalisme et ensuite les travailleurs jugeront eux-mêmes de ce qui leur convient. Sans doute, mais le socialisme n'est qu'un cadre. Pour le rendre désirable, il faut meubler ce cadre des projets possibles. Fédéralisme et réformes de structure, pour quoi faire? Et que fabriquera-t-on dans ces entreprises d'initiative publique qui doivent permettre une vraie reconversion?

Des critères doivent être définis, il faut commencer à élaborer le plan économique et le plan d'aménagement du territoire. Ces plans resteront généraux et relativement abs-traits car le détail des possibilités technologiques futures reste une inconnue. Mais il faut parfois en éclairer certaines faces par un développement concret et précis, pour mettre en évidence les possibilités que le capitalisme laisse en friche et pour susciter un débat qui ravive l'intérêt des travailleurs pour le Socialisme.

RESUMONS :

- Les villes, qui se sont étendues par l'auto, étouffent par elle.

- La mobilité a apporté une certaine liberté, mais pour pouvoir l'exercer, il faut retourner à l'emploi massif du transport en commun.

- De nouvelles techniques de transport terrestre en commun sont à l'étude.

- Les villes doivent être reconstruites en fonction de ces transports et il est plus facile de construire du neuf que d'adapter du vieux.

- En Belgique, la centralisation, dans la capitale, de l'activité de deux peuples qui ont pris con-science, l'un de son déclin, l'autre de sa personnalité culturelle puis de son développement industriel, conduit à des conflits culturels qui aident la bourgeoisie à préserver son pouvoir, mais ajoutent aux contraintes matérielles de la vie urbaine.

- L'habitat d'un de ces peuples est partagé entre cette capitale et un chapelet de bassins industriels qui perdent rapidement leur emploi et plus lentement leur population.

- Le pays noir devient la banlieue grise de Bruxelles, relié à elle par ce médiocre métro de conurbation qu'est le vieux chemin de fer.

- La disposition en long de ces vieilles concentrations urbaines permet d'y utiliser immédiatement une nouvelle infrastructure de transport en commun et d'y reconstruire ensuite, progressivement, la ville nouvelle.

- Pour les Wallons, cette perspective se confond avec celle du renouveau économique. Elle offre aux Bruxellois une alternative à l'étouffement entre les Flamands et les autos.

Pour les Flamands, elle résout le problème de la tache d'huile.

- Sans un tel plan de réaménagement du territoire, le fédéralisme va à contre-courant d'une centralisation croissante de l'activité sociale.

- Réciproquement, cette perspective urbanistique n'est pas réalisable dans le cadre politico-économique actuel.

Préciser cette perspective et en débattre doivent contribuer à donner aux gens la volonté de faire sauter ce cadre. Mais le Bruxellois, en attendant de déménager dans sa cité radieuse, peut rendre sa ville plus vivable en exigeant le tram gratuit, financé par le parking payant généralisé.

Quant à cette nouvelle Wallonie, elle sera d'autant plus facile à construire que la vieille Wallonie aura pu se défendre, en exigeant son autoroute et surtout en luttant pour la défense de l'emploi et pour de nouvelles structures économiques.

Contact webmaster

Avec le soutien de la Formation Leon Lesoil, 20, rue Plantin, B-1070 Bruxelles, Belgique